Maligny

Histoire

Troubles en 1848 et 1851

Avec la Restauration, les idées républicaines faiblement enracinées s'assoupirent et ce fut miracle quelles puissent se réveiller en 1848, après un sommeil de près d'un demi-siècle. La population se courbait sous un pouvoir centralisé, comme elle s'était courbée pendant des siècles sous l'autorité féodale.

Pour donner une idée du peu de participation qu'avaient les habitants à l'administration du pays, je dirai que les électeurs reconnus par la loi électorale avec suffrage restreint étaient, en 1842, au nombre de cinq, dont les trois frères Rabé et en 1847 de onze, dont le baron de Bastard et toujours les trois Rabé. C'était vraiment peu et les Gaulois avaient plus de part à leur gouvernement que les français d'avant 1848 !

Il faut dire que la famille Rabé gouvernait à elle seule le pays avec les trois frères : Etienne, régisseur du château, juge de paix, conseiller général; Janny, maire, notaire ; Maurice, marchand de bois et gendre du docteur Testevinde.

L'annonce de la Révolution de 1848 secoua Maligny de sa torpeur. Quelques tentatives antérieures avaient permis la création d'un petit centre d'études sociales, mais les tracas et les poursuites qui attendaient leurs membres en annihilaienl tout progrés. Les idées, les traditions et les intérêts des Rabé ne pouvaient leur laisser tolérer la présence, dans leur pays, de ceux qu'on appelait " les socialistes " .

Après le 1er février 1848, la République étant proclamée, le pouvoir des Rabé cessa de s'affirmer , mais ils conservèrent presque tous leurs postes, attendant un revirement. Les républicains de l'époque restaient suspects et constituaient même des sujets d'épouvante. En trois ans, la République ne put lancer de profondes racines dans le pays. Aussi le Coup d'Etat du 2 décembre 1851 suscita-t-il peu de protestations à Maligny. D'ailleurs les précautions avaient été bien prises par le préfet Ornano et la plupart des chefs socialistes furent arrêtés. La terreur régna immediatement dans le pays.

Le 5 décembre 1851, cinq personnes furent arrêtées et emprisonnées. D'autres furent déclarées suspectes. Trois furent libérées en février 1852, après une détention dans des conditions véritablement cruelles, leur faisant subir les rigueurs de l'hiver et d'une nourriture insuffisante. Le médecin de la maison d'arrêt d'Auxerre dut protester contre les conditions inhumaines dans lesquelles vivaient les prisonniers.

Un survivant de ces épreuves fut déporté à Lambessa en Algérie, où il se fixa.

Un autre, grâcié cn septembre 1852 dut rester en résidence surveillée, avec défense de reparaître à Maligny. En butte aux tracasseries policières, il mourut en 1856.

En 1863, un premier projet de société de Secours mutuels avait été préparé, mais il fut repoussé. Les tendances libérales s'étant accentuées, une nouvelle demande fut acceptée en 1869. Ce fut la première association autorisée.

Depuis 1791, les châtelains de Maligny, Devin et de Bastard, laissèrent peu de traces au pays. On ne les voit intervenir en aucune occasion. Seule la famille Rabé est agissante et se trouve mêlée aux événements de la commune. Cette situation continua pendant toute la période de l'Empire.